LUNDI QUI RIT, LUNDI QUI PLEURE

Drôle de lundi, décidément, qui me laisse un sentiment mi- chèvre mi- chou.

Une coalition internationale mobilisée contre le Covid-19, la France en pointe. L’échec du multilatéralisme depuis le début de la crise du Covid-19 n’est plus à démontrer. Et pourtant, c’est bien une coalition internationale ciblée, fondée sur une action collective et coordonnée qui s’est mise en place le 24 avril dernier, et qui a levé 7,4 Mds € hier grâce à la conférence menée par la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen. Comme il y a 20 ans face au Sida notamment, ce sont des institutions ciblées, ad-hoc qui ont su réagir : dès le début de l’épidémie, Gavi a intensifié son action pour les vaccins, le Fonds Mondial a accru son action envers les plus vulnérables et Unitaid a investi dans des diagnostics, des traitements et des outils de triage pour les maladies respiratoires. Elles se sont unies pour agir avec l’idée simple que face à la menace mondiale de l’épidémie, seule une réponse globale pouvait être efficace. Pas seulement pour des raisons morales : on ne peut dans la tourmente abandonner les plus vulnérables ; mais aussi par intérêt bien compris : à ne pas agir au Sud on prend le risque d’un effet boomerang de l’épidémie chez nous. Nos institutions, rejointes par d’autres, ont été fermement incitées par le président E. Macron, qui nous a réunis et mobilisés, à s’unir et agir collectivement. Cela nous a menés à lancer un Appel à la communauté internationale (Call to action du 24 avril – document à télécharger ci-dessous ainsi que le discours prononcé par Marisol TOURAINE) désormais financé. Bonne journée hier donc : le multilatéralisme n’est pas complètement mort, dès lors qu’il s’appuie sur des organisations opérationnelles, au savoir-faire reconnu et ciblé ; et il a donné naissance à une mobilisation collective forte et financée. Quelques lueurs d’espoir dans un environnement bien sombre. C’était le lundi qui rit.

Le déconfinement à reculons, la France broie du noir. Même jour, même heure, autre lieu : le Sénat a rejeté le plan de déconfinement présenté par le Gouvernement. Soit. Après tout, il n’est pas anormal que les forces politiques du pays présentent des projets alternatifs sur une question d’une telle importance. Le problème est que de plan alternatif, on n’a pas entendu parler. Je ne cherche absolument pas à défendre par principe la démarche du Gouvernement : de retards à l’allumage en couacs de communication, en passant par des dysfonctionnements opérationnels sérieux, la gestion de la crise n’aura pas été un long fleuve tranquille. Mais aujourd’hui la question n’est pas de savoir si on va déconfiner ou pas,  mais comment. La France est l’un des pays européens qui s’engage le plus à reculons dans ce processus, et l’on entend davantage l’expression des craintes que celle de propositions pour accompagner une reprise sécurisée. Il ne peut être question de sacrifier la santé des Français sur l’autel de la reprise économique et un déconfinement mal maîtrisé provoquerait un rebond de l’épidémie fatal à toute reprise économique. La solution ne peut cependant venir d’une prolongation du confinement. On a le sentiment que la peur domine, et la responsabilité de l’exécutif n’est pas mince. Pour imposer le confinement, il a joué sur la peur du virus, et cette peur aujourd’hui nous tétanise collectivement. Au moment où l’on s’interroge sur les raisons du succès allemand, il me semble qu’il faudrait creuser cette piste : les relations entre les Français, leurs institutions et leurs représentants sont si dégradées que l’infantilisation tient lieu de politique publique là où en Allemagne, la recherche du compromis et le dialogue serein servent de boussole. La France voit tout en noir. Comment dans ces conditions penser un monde d’après positif et mobilisateur ? C’est le temps des grandes peurs. C’était le lundi qui pleure.

Marisol TOURAINE

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