Sommet social : « L’enterrement de la politique de Sarkozy »

INTERVIEW. « Un goût d’inachevé », « des mesurettes loin du compte », « un bilan implacable de son action »… Marisol Touraine, en charge des questions sociales au sein de l’équipe de François Hollande, livre au JDD.fr une analyse sans concession du sommet social qui s’est tenu mercredi matin à l’Elysée.

Que retirez-vous des annonces faites par Nicolas Sarkozy?
Ce sommet laisse un gout d’inachevé. Manifestement, les propositions de Nicolas Sarkozy ne seront connues qu’à la fin du mois donc il est trop tôt pour dresser un bilan de ce sommet. Il y a tout de même des mesures qui vont dans le sens de ce que souhaitaient les organisations syndicales et nous-mêmes. Notamment en faveur de l’activité partielle.

Nicolas Sarkozy a notamment prévu de déployer 100 millions d’euros pour l’activité partielle… Cela vous satisfait-il?
C’est une mesurette loin du compte et ce chiffre est notoirement insuffisant. C’est une façon de faire un petit pas bien timide dans la bonne direction. Il faut rester sur ces gardes parce que le fait que rien n’ait été annoncé sur la hausse de la TVA, sur la privatisation du logement social, sur la flexibilisation accrue des contrats de travail, ne signifie pas que rien ne sera annoncé en la matière. Et je crains que Nicolas Sarkozy ne nous prévoie de mauvaises nouvelles.

Quelque 1.000 emplois vont être créés à Pôle emploi. N’est-ce pas un premier pas?
Ça n’est pas suffisant. Pourquoi ne l’a-t-on pas fait avant? Pourquoi nous explique-t-on aujourd’hui qu’il faut revoir de fond en comble la formation professionnelle? Pourquoi nous explique-t-on que la compétitivité du travail n’est pas à la hauteur? Nicolas Sarkozy dresse un bilan implacable de sa propre action. Ce sommet social est aussi l’enterrement sans fleur ni couronne de la politique qu’il a mené depuis cinq ans.«Sarkozy est à mille lieux de la réalité sociale»

A l’issue de la formation des chômeurs, « chacun sera conduit à accepter une proposition d’emploi ». Comment interprétez-vous cette formulation?
Si le discours est toujours de dire que les Français qui sont sans emploi sont ceux qui refusent de travailler, je crois que Nicolas Sarkozy est à mille lieux de la réalité sociale de notre pays. On voit bien d’ailleurs que ce sommet n’a pas de sens. La montée du chômage n’est pas la montée de la paresse dans notre pays.

Le chef de l’Etat n’a pas évoqué explicitement le terme de « TVA sociale » et simplement dit qu’il avait « entendu les remarques »…
S’il recule sur ce sujet, ça sera une bonne nouvelle et une victoire, mais je ne suis pas encore certaine à ce stade que les Français puissent dormir sur leurs deux oreilles.

« Quel que soit le calendrier politique, la crise, le chômage, la souffrance de nos compatriotes ne laissent le droit à aucun d’entre nous de rester dans l’immobilisme et l’inaction », a lancé Nicolas Sarkozy. François Hollande est-il, selon vous, visé par cette remarque?
Je lui répondrai qu’il ne suffit pas de bouger. Encore faut-il bouger dans l’intérêt des Français. Depuis cinq ans, l’agitation permanente de Nicolas Sarkozy se sera traduite par plus de chômage, plus de précarité, plus d’insécurité pour les Français. Ça n’est pas un bilan dont il puisse se valoriser.

Caroline Vigoureux – leJDD.fr

Crédits photos : Reuters