Retrouvez ci-dessous un entretien de Marisol TOURAINE publié sur le site de TSA, l’actualité de l’action sociale.
La spécialiste des questions sociales auprès de François HOLLANDE détaille ses engagements. Le candidat socialiste annonce notamment la création d’une agence de l’accessibilité et détaille les trois axes principaux d’une réforme de la perte d’autonomie. Sur la lutte contre la pauvreté, il se prononce pour une approche globale de cette question.
ACCESSIBILITÉ
Le quinquennat qui va s’ouvrir devra veiller au respect de l’échéance de 2015 pour la mise en accessibilité des lieux publics aux personnes handicapées. Comment veiller à l’application de cette mesure sur le terrain ?
La mise en accessibilité des équipements a pris un retard considérable. Et nous déplorons qu’il y ait eu diverses tentatives pour tenter de déroger à cette obligation. Le travail à accomplir pour être prêt en 2015 est énorme. François Hollande souhaite procéder à un bilan complet de la situation avant la fin de l’année. Il faudra mettre en place une agence de l’accessibilité chargée d’évaluer la situation et de repérer let diffuser les bonnes pratiques.
Comptez-vous appuyer, y compris financièrement, les structures qui rencontrent des difficultés pour mettre aux normes leurs établissements ?
Diverses associations comme l’association des paralysés de France ont montré qu’il était possible de faire des aménagements qui ne soient pas trop coûteux. Ce sera d’ailleurs le rôle de l’agence de l’accessibilité de promouvoir ces bonnes pratiques. Quant aux financements, l’état des finances publiques empêche d’aller au-delà de l’existant aujourd’hui.
SCOLARISATION DES ENFANTS HANDICAPES
La scolarisation des enfants handicapés a progressé, mais est jugée encore largement insuffisante. Quelles dispositions, y compris budgétaires, comptez-vous prendre pour répondre aux besoins des familles et des enfants ?
Cette question de la scolarisation est essentielle. Comment peut-on imaginer atteindre les 6 % d’emplois occupés par des travailleurs handicapés si on ne les scolarise pas dès le plus jeune âge. N’oublions pas que le chômage chez ceux-ci est deux fois plus important que la moyenne, en partie à cause d’un niveau de formation très bas. Pour faire progresser cette scolarisation, une partie des 60 000 postes qui seront créés dans l’Education nationale au cours du quinquennat sera destinée à l’accueil et à l’accompagnement de ces enfants handicapés.
AVS insuffisants et mal formés, associations manquant de moyens… sur l’enjeu de l’accompagnement des enfants handicapés, quelles solutions proposez-vous ?
Il faut effectivement donner un vrai statut aux AVS pour les stabiliser et mieux les former. Il n’est pas possible de demander à ces personnes de s’investir durablement dans cette fonction si en avril, elles ne savent si elles continueront à travailler à la rentrée de septembre.
PERTE D’AUTONOMIE
La réforme de la dépendance a finalement été repoussée. Pensez-vous en faire une priorité et à quelle échéance ? Quels objectifs doit poursuivre une telle réforme ?
Le gouvernement actuel a une responsabilité lourde dans cet échec : non seulement, il n’a pas mené à bien la réforme sur la dépendance, mais il n’a pas préparé la société française à anticiper son vieillissement. François Hollande a déjà annoncé qu’il fera voter une loi-cadre sur le vieillissement qui fixera des objectifs pour l’adaptation des logements, des modes de transport, etc. Sur le volet spécifique de la perte d’autonomie, la réforme qui pourrait intervenir en 2013 fera du maintien à domicile sa priorité à travers trois grands objectifs : adapter 80 000 logements par an ; doubler le plafond de l’APA à domicile pour les plus dépendants (GIR 1 et 2) ; proposer un plan d’accompagnement des aidants.
Parlons gros sous. Quel sera le coût de la réforme et comment la financer ?
Le coût de cette réforme ira grandissant et sera financé par une cotisation de solidarité payée par tout le monde. Nous refusons le renvoi aux assurances privées.
AIDE A DOMICILE
Sur le terrain, les services d’aide à la personne (SAP) pour les publics vulnérables sont fragilisés et doivent parfois mettre la clé sous la porte. Concrètement, comment leur donner de l’oxygène pour qu’ils continuent à se professionnaliser et à diversifier leurs offres ?
Le doublement du plafond pour les personnes les plus dépendantes est une façon d’aider ces services. Ainsi, davantage d’heures de soutien à domicile pourront être financées. Il faut, en effet, poursuivre l’effort de professionnalisation. Je note d’ailleurs une grande ambiguïté dans la politique actuelle : nous entendons, d’un côté, un discours sur la solidarité nationale et la priorité au maintien à domicile et de l’autre, depuis le plan Borloo sur le développement des services à la personne un discours vantant les bienfaits de la concurrence.
Les SAP lucratifs se plaignent de ne pas pouvoir intervenir beaucoup dans ce secteur. Comptez-vous changer les règles pour leur permettre d’être plus présents ?
Nous n’allons pas changer les règles du jeu pour qu’un acteur soit davantage présent qu’un autre. La clé est de proposer des agréments qui garantissent une qualité de service.
PAUVRETÉ
Pour s’attaquer à la montée de la pauvreté dans notre pays, quels chantiers comptez-vous lancer ?
La montée de la pauvreté constitue un échec flagrant pour le pouvoir. Ce que François Hollande propose, c’est de mettre la lutte contre la pauvreté au cœur de toutes les politiques. Cela concerne aussi bien l’accès à la santé, la lutte contre le décrochage scolaire ou l’encadrement des loyers. A côté de ces mesures générales qui touchent par ricochet les personnes les plus en difficulté, nous souhaitons mettre en œuvre des mesures plus ciblées comme la pérennisation sur toute l’année de 15 000 places d’hébergement d’urgence.
Le RSA a été créé lors du quinquennat qui se termine. Comptez-vous le réformer ?
Soyons clair : personne ne souhaite vivre très longtemps avec les 450 euros du RSA. Il s’agit bien de permettre l’insertion professionnelle du plus grand nombre de bénéficiaires de ce revenu de solidarité. L’enjeu est donc bien de favoriser une reprise de l’activité économique créatrice d’emplois. Par ailleurs, je signale que le fait majeur par rapport au RSA n’est pas celui des fraudes, mais celui du non-recours.
les promesses n’engagent que celles et ceux qui les croient … attention aux taux d’imposition … ressemblera-t-il à celui de la touraine avec + 25% en 3 ans ????
merci
Il est fréquent d’opposer le care, dispensé par des personnes, aux robots. De mon point de vue, c’est une opposition stérile et contreproductive. Tout ce qui va dans le sens d’une amélioration de l’autonomie me semble bon. D’ailleurs à qui viendrait l’idée de contester la fabrication des lunettes ou celle des prothèses dentaires?
Concernant l’aménagement des postes dans les entreprises, il y aurait aussi beaucoup à faire, parce que former des autistes, c’est très bien, mais si c’est pour qu’ensuite ils ne puissent pas travailler, c’est dommage.
De la même façon que chacun cotise en argent à l’état social, ne serait-il pas possible d’imaginer un mécanisme favorisant la contribution en temps qui jouerait à la fois sur l’isolement et sur le chômage à moindre coût.
http://solidariteliberale.hautetfort.com/archive/2005/04/29/le-contrat-de-travail-mixte-co.html
Contribuer à résoudre l’exclusion peut être l’affaire de tous, c’est aussi une question d’institutions, pas seulement d’argent: http://solidariteliberale.hautetfort.com/archive/2012/03/29/pour-un-bapteme-civil.html
Pourquoi le thème de la société de soin mutuel du PS a t-il fait un flop? Peut-être à cause de sa trop grande proximité avec des valeurs habituellement portées par les démocrates chrétiens?
http://solidariteliberale.hautetfort.com/archive/2012/04/23/analyse-de-l-echec-du-theme-de-la-societe-de-soin-mutuel.html
Tous mes encouragements pour revigorer l’état social en y associant mieux les personnes.
Madame,
Je lis avec intérêt le développement du programme de François Hollande, en ce qui concerne la dépendance et plus particulièrement la place du domicile pour les personnes fragilisées. Je trouve vos propositions intéressantes, mais malheureusement je pense que les propositions ne permettent pas le déclin d’associations d’aide à domicile. Étant moi même président d’une association ADMR en Finistère, je pense qu’effectivement la professionnalisation a toute sa place, et les efforts consentis par les structures depuis de nombreuses années le prouvent, par contre cette professionnalisation a un coût absorbé principalement par les associations, et non pris en compte de le forfait heure proposé par le CG des départements, et vous n’êtes pas sans savoir que plus les personnels sont qualifiés, plus les coûts salariaux et les augmentations annuelles sont croissantes. L’augmentation du nombre d’heures en GIR 1 et 2 est également une mesure importante, mais nous retombons sur cette même problématique, le coût restant invariablement le même, nous devrons embaucher de nouveaux professionnels pour répondre aux besoins, ce qui ne réduira pas nos déficits chroniques, mais au contraire générera des frais nouveaux. Je prends un exemple simple, nos professionnels interviennent 7/7 dans une amplitude horaire importante, sur des temps de plus en plus réduits, et des transports de plus en plus conséquents pour intervenir auprès des personnes fragilisées. En rajoutant des heures d’intervention, les professionnels salariés ne pourront multiplier leur temps, puisque les besoins restent sur des horaires souvent identiques (aide à la toilette, aide au repas, préparation des repas, levers, couchers), donc il ne sera pas possible de leur proposer plus d’heures, mais bien de devoir embaucher de nouvelles personnes sur des contrats précaires, notre priorité étant de conserver les personnes en CDI. Dernier point que vous maitrisez j’en suis sur, la perte des heures généralisée sur notre territoire, puisque les derniers rapports définissent un mieux vieillir des personnes âgées, et nous en sommes les premiers satisfaits, mais nos plans d’aide se réduisent, les mutuelles limitent le nombre de prises en charge, la valorisation de l’heure est majoritairement minime… Je lance cet appel car je pense qu’il faut rapidement s’attacher à la problématique, et réfléchir aux nouvelles organisations, afin de ne pas se retrouver avec une problématique de santé publique importante dans les années qui viennent. Je pense également que la prise en charge globale doit se faire, et que le regroupement des services d’aide à domicile, doit être pensé avec les SSIAD, avec les maisons pluridisciplinaires de santé, les groupements infirmiers… de la même façon qu’a été pensé la prévention primaire, secondaire et tertiaire. J’espère vivement que cet appel sera entendu et reste à votre disposition pour en discuter.
Franck PERRIGAULT
Président d’une association ADMR
Consultant en santé publique
Chargé de cours à la faculté de médecine de Brest
Ancien Coordinateur du maintien à domicile des personnes séropositives Paris.
Bonjour Madame,
vous êtes présentée par les médias comme une possible ministre des affaires sociales et de la santé. Ce secteur a souffert des orientations précédentes caractérisées par un laisser faire, laisser aller qui a généré un flottement général dans la conduite des politiques sociales. Sans armature, le dispositif se délite progressivement, laissant le corps social concerné par ces questions à lui même. Le financement constitue une question importante, cependant l’essentiel des questions c’est le sens de l’action, retrouver l’idée et l’énergie de la solidarité nationale en lieu et place du tout émotionnel, du compassionnel. A ce titre la participation de Martin Hirsch au précédent gouvernement a constitué de fait une rupture de sens car il s’associait aux politiques sécuritaires d’obédience vichyssoise menées par l’Intérieur.
Les professionnels du médico social attendent des signes forts et une reprise de sens affirmée. La conjoncture économique est comprise de chacun(e) et personne n’attend la lune.
Remettez au travail les équipes de terrain par une structuration forte de la politique nationale, en luttant contre le clientélisme propre aux élus locaux, en utilisant la matière grise dont vous disposez, ceci afin d’humaniser le travail médico social mis à mal par de très longues années de dérives idéologiques managériales.
Nous avons besoin que l’Etat remette de l’ordre dans les services chargés de décliner les mesures de solidarité nationale : c’est chaque jour un peu plus le foutoir.
A laisser en l’état ce dispositif, il s’enfonce dans l’anomie, au même titre que les personnes en attente de soutien.
Votre responsabilité est grande, il n’est pas concevable que vous puissiez échouer, car en attente se tient le front national : nous savons à quoi nous attendre!
Tenons nous fraternellement et travaillons!